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Une graine d’inspiration, née dans l’esprit d’un étudiant en génie canadien, a donné naissance à un institut de physique théorique remarquable qui transforme le visage de la physique.

Bien avant que Mike Lazaridis ne devienne un entrepreneur célèbre et le fondateur de l’entreprise qui allait devenir BlackBerry, la graine d’inspiration pour un institut de physique théorique de classe mondiale avait déjà germé dans son esprit.

Il était alors étudiant de premier cycle en génie à l’Université de Waterloo lorsqu’un de ses professeurs, Lynn Watt — qui avait appris la mécanique quantique auprès du lauréat du prix Nobel Enrico Fermi — décida d’offrir un cours facultatif en soirée consacré aux grands articles de physique.

Mike Lazaridis devant l’Institut Périmètre, né d’une idée audacieuse devenue un carrefour mondial de la physique théorique.

Le cours était populaire. Lazaridis se retrouva dans un amphithéâtre bondé d’étudiants enthousiastes, tous impatients de découvrir un article alors tout nouveau décrivant une expérience menée en 1982 par le physicien français Alain Aspect. Cet article apportait une preuve expérimentale que ce qu’Albert Einstein avait autrefois qualifié « d’action fantomatique à distance » entre des particules intriquées fortement corrélées se produisait bel et bien.

« Nous étions stupéfaits », se souvient Lazaridis. « Au début, nous avions du mal à croire ce que le professeur Watt nous disait sur les implications. » Des décennies plus tard, en 2022, Alain Aspect recevrait le prix Nobel pour cette expérience et cet article.

Mais pour Lazaridis, ce fut une porte d’entrée vers les merveilles de la physique théorique.

« Il faut comprendre qu’à l’époque, tout cela était encore très controversé. La superposition et l’intrication faisaient encore débat. Alors pour nous, dans cette classe, le monde a changé radicalement en moins d’une heure », raconte Lazaridis.

Il comprit aussi qu’il restait encore des découvertes à faire, des révolutions scientifiques à venir.

La théorie de la gravité d’Einstein, la relativité générale, n’avait pas encore été conciliée avec la théorie quantique — et ce n’est toujours pas le cas. Lazaridis comprenait que si une percée pouvait survenir, ses conséquences seraient monumentales, comparables au développement de la théorie quantique il y a cent ans, qui a donné naissance à toutes les technologies numériques extraordinaires que nous utilisons aujourd’hui.

« Je savais que si c’était possible, cela nous placerait en position de changer le monde, d’accroître la réputation de notre pays, et que cela pourrait être un levier pour l’industrie et la création de richesse à venir », dit Lazaridis.

Mike Lazaridis s’adresse aux invités lors de l’inauguration officielle de l’Institut Périmètre, partageant sa vision de l’avenir de la physique.

C’est ainsi que l’idée de créer un institut entièrement consacré à la physique théorique a commencé à prendre forme. Des années plus tard, en 1999, après avoir fondé Research In Motion (devenu BlackBerry), Lazaridis avait les moyens de concrétiser cette vision. L’Institut Périmètre a officiellement vu le jour le 23 octobre 2000.

L’Institut Périmètre entame maintenant sa 25e année d’existence, et des célébrations sont prévues tout au long de 2025.

La construction de l’Institut Périmètre

Lazaridis savait pertinemment qu’il ne pouvait pas créer seul l’institut qu’il imaginait.

« Lorsqu’on entreprend un projet de cette envergure, il faut s’entourer de la bonne personne à la tête, du bon personnel, de la bonne équipe, du bon conseil d’administration », dit-il.

Par hasard, il a reçu une lettre de Howard Burton, titulaire d’un doctorat en physique et d’une maîtrise en philosophie, qui cherchait un emploi chez la société de téléphones intelligents à la fin de 1999. En lisant la lettre, Lazaridis a été intrigué. Il tenait là quelqu’un qui nourrissait un vif intérêt pour la physique et la philosophie, et qui pourrait bien avoir les compétences nécessaires pour concrétiser un institut de physique théorique.

Ils se sont rencontrés dans un stationnement à Brampton (près d’un édifice où Lazaridis avait une réunion d’affaires), puis sont allés souper dans un restaurant italien. « Je lui ai demandé d’élaborer un plan, raconte Lazaridis. Je lui ai dit : “Si tu avais le financement, comment t’y prendrais-tu ?” »

Howard Burton devant l’Institut Périmètre, où il a été le premier directeur exécutif.

Burton a pris la tâche au sérieux. Il a fait beaucoup de recherches, rendant visite à des physiciennes et physiciens théoriciens dans des hauts lieux académiques de renom, comme l’Institut Max Planck de physique gravitationnelle en Allemagne, l’Université d’Oxford au Royaume-Uni et l’Université de Princeton aux États-Unis.

Il cherchait les ingrédients magiques qui permettraient de créer un véritable grand institut de physique. Lazaridis raconte que Burton a produit un plan qu’il avait baptisé « Perimeter », et le nom est resté. Dans son livre, First Principles: Building Perimeter Institute, Burton explique qu’il pensait à un « cercle de connaissances » qui s’élargit vers l’extérieur et repousse les frontières.

Le plan de Burton a convaincu Lazaridis, qui l’a engagé comme premier directeur du jeune institut.

L’étape suivante consistait à former le conseil d’administration et à rédiger une constitution, mais surtout à attirer des chercheurs et chercheuses respectés provenant de grandes institutions internationales. Ce n’était pas une mince affaire : il fallait construire l’Institut Périmètre dans une ville canadienne de taille moyenne nommée Waterloo — que la plupart de ces chercheurs ne connaissaient même pas — et les convaincre de se joindre à un institut de physique théorique qui n’existait pas encore.

Il fallait aussi convaincre les responsables fédéraux et provinciaux d’offrir un financement équivalent à ce que beaucoup d’observateurs extérieurs voyaient comme un projet utopique dont les retombées ne se feraient sentir que dans un avenir lointain.

« Ce n’était pas gagné d’avance. C’était du travail acharné, vraiment acharné, se souvient Lazaridis. On proposait quelque chose qui s’inscrivait dans un horizon de temps exceptionnellement long. Ce n’est pas comme si on disait : “on va faire ça, et l’industrie en récoltera les fruits dès demain.” »

Mais comme Lazaridis soutenait le projet — investissant d’entrée de jeu plus de 100 millions de dollars, soit environ le tiers de sa fortune à l’époque — le financement public et les donateurs privés ont suivi. L’appui crucial des gouvernements fédéral et provincial a permis de concrétiser l’Institut Périmètre.

Tout comme le soutien de la communauté locale.

L’ancien directeur de l’Institut Périmètre, Neil Turok, donne une conférence publique, perpétuant une tradition de 25 ans visant à rapprocher la physique du grand public.

« Je tiens à souligner l’appui de la communauté de Waterloo, des entreprises locales, ainsi que des gouvernements municipaux et régionaux, qui, dès les débuts, ont contribué à choisir le terrain où se trouve aujourd’hui l’Institut Périmètre, au cœur de Waterloo. Et depuis, ils ont aidé les chercheuses, chercheurs et visiteurs de l’Institut à se sentir ici chez eux », affirme Lazaridis.

Le conseil d’administration fondateur était composé d’un mélange d’entrepreneurs technologiques et de membres du milieu universitaire.

Outre Lazaridis, le conseil comptait notamment feu Douglas Wright, ancien président de l’Université de Waterloo ; John Reid, associé directeur chez KPMG ; Cosimo Fiorenza, qui allait jouer un rôle-clé chez Quantum Valley Investments et aider à fonder de nombreuses jeunes entreprises en technologie quantique ; feu Lynn Watt, le professeur de génie dont le cours de physique avait inspiré Lazaridis ; Kendall Cork, ancien directeur chez Research In Motion (RIM) ; et feu George Liebbrandt, un physicien théoricien établi à Guelph.

« Je leur serai toujours infiniment reconnaissant pour leur appui sincère et leur travail acharné, pendant de nombreuses années et à travers bien des défis, pour faire naître l’Institut Périmètre et le mener vers le succès », ajoute Lazaridis.

Burton et Lazaridis ont aussi recruté des scientifiques externes talentueux pour former un Comité consultatif scientifique (Scientific Advisory Committee ou SAC), capable d’offrir un avis impartial et éclairé à ce jeune institut sur les grandes orientations de recherche. Le premier comité SAC comptait des figures de proue du monde de la physique, comme Roger Penrose, James Hartle, Chris Isham, Artur Ekert, Scott Tremaine, Ian Affleck, Cecilia Jarlskog et Joe Polchinski.

La première réunion du SAC a eu lieu au printemps 2001. Ces conseillers scientifiques de renom ont consacré énormément de temps et d’énergie à l’Institut, se souvient Robert Myers, membre du corps professoral fondateur (et plus tard directeur). « Je sais que Howard et l’ensemble de l’Institut ont grandement bénéficié de leurs conseils, de leur encadrement et de leurs recommandations. »

Au moment de sa fondation, l’Institut Périmètre comptait à l’interne trois professeurs (Robert Myers, Lee Smolin et Fotini Markopoulou), deux professeurs associés (Raymond Laflamme et Michele Mosca), ainsi que quatre boursiers postdoctoraux (Olaf Dreyer, Oliver Winkler, John Brodie et Konstantin Savvidis).

From vision to reality

En 25 ans, l’Institut Périmètre est passé à 25 professeures et professeurs de recherche, 22 professeures et professeurs associés (ayant une nomination conjointe entre Périmètre et d’autres établissements), ainsi que 70 boursiers postdoctoraux venus de 26 pays, 79 doctorantes et doctorants issus de 29 pays, et 25 étudiantes et étudiants à la maîtrise provenant de 18 pays.

Aujourd’hui, l’Institut accueille sans cesse des centaines de scientifiques en visite, y compris des chaires de recherche invitées, des fellows, des conférencières et conférenciers, ainsi que de nombreux collaborateurs et invités. Chaque année, plus d’une douzaine de conférences sont organisées, réunissant à chaque fois des centaines de scientifiques du monde entier venus collaborer à Waterloo.

At Perimeter Institute, collaboration has always been key. Researchers gather at the chalkboard to solve physics’ most complex problems.

L’Institut Périmètre abrite aussi une équipe de sensibilisation primée, composée de pédagogues chevronnés qui conçoivent et diffusent gratuitement du matériel destiné aux enseignants. Chaque année, cette équipe forme des enseignantes et enseignants du secondaire dans le monde entier afin que la physique moderne rejoigne des millions de jeunes dans des leçons captivantes et inspirantes.

Les conférences publiques de l’Institut Périmètre, immensément populaires dès le départ, avaient d’abord lieu dans divers édifices de la région, partout où l’on trouvait une salle suffisamment grande. Elles sont maintenant présentées dans le Théâtre des idées Mike-Lazaridis de l’Institut. Les billets s’envolent en quelques minutes, preuve de l’intérêt constant du public pour les développements les plus récents en physique.

Pour celles et ceux qui n’obtiennent pas de billets, les conférences sont diffusées en direct en ligne. Et il n’y a pas que les conférences publiques : les séminaires et ateliers de l’Institut Périmètre sont aussi accessibles gratuitement à tous et à toutes grâce à l’Archive des séminaires enregistrés de l’Institut Périmètre (PIRSA). N’importe qui, à n’importe quel niveau, peut suivre ces cours et séminaires depuis n’importe où dans le monde. Ces ressources sont une véritable mine d’or pour les jeunes qui rêvent de devenir physiciens ou physiciennes.

Visitors tour Perimeter Institute during a Doors Open event, experiencing the spaces where groundbreaking physics takes place.

Cette croissance fulgurante au fil des 25 dernières années a été rendue possible grâce aux partenaires gouvernementaux et aux généreux donateurs, tous déterminés à ne laisser personne de côté dans l’effort de bâtir une société férue de science.

Selon M. Lazaridis, l’indépendance de l’Institut — qui ne relève d’aucune administration universitaire —, conjuguée à ses programmes de formation pour les jeunes scientifiques et à ses efforts de sensibilisation du grand public, font du Périmètre un institut unique au monde.

Et cela a porté fruit.

« L’Institut Périmètre a dépassé toutes nos attentes, affirme M. Lazaridis. Il a grandement contribué à la réputation internationale du Canada et est aussi devenu une source de grande fierté pour les Canadiens. »

Alors que l’Institut célèbre son 25e anniversaire, une nouvelle page s’ouvre dans son histoire.

Rob Myers, Director Emeritus and BMO Financial Group Isaac Newton Chair in Theoretical Physics, addresses the Perimeter community during a pivotal moment in the Institute’s 25-year journey.

Robert Myers vient de terminer son mandat de cinq ans à titre de troisième directeur de l’Institut Périmètre (après Howard Burton et Neil Turok) et revient à la recherche à temps plein au Périmètre. Il y occupe désormais le poste de directeur émérite et titulaire de la Chaire Isaac-Newton en physique théorique de BMO Groupe financier.

Leading with vision: Marcela Carena, the new executive director of Perimeter Institute.

Marcela Carena a été nommée nouvelle directrice générale de l’Institut. Cette physicienne des particules de renom a précédemment dirigé la division théorique du Fermi National Accelerator Laboratory (Fermilab) et occupé un poste de professeure de physique à l’Université de Chicago.

« Je suis heureux que le président du conseil, Michael Serbinis, le conseil d’administration et les comités consultatifs aient mené une recherche aussi rigoureuse et fructueuse, qui a mené au recrutement d’une nouvelle directrice générale aussi accomplie, talentueuse, respectée et chevronnée pour écrire le prochain chapitre du Périmètre », déclare Lazaridis.

« Je suis très fier de tout ce que l’Institut Périmètre, ses chercheuses, chercheurs et membres du personnel ont accompli jusqu’ici », dit-il, en ajoutant que les 25 prochaines années s’annoncent « encore plus palpitantes ».

 

This is part one of an ongoing series. In Chapter 2, discover how early risks and bold moves shaped Perimeter’s future.

À propos de l’IP

L'Institut Périmètre est le plus grand centre de recherche en physique théorique au monde. Fondé en 1999, cet institut indépendant vise à favoriser les percées dans la compréhension fondamentale de notre univers, des plus infimes particules au cosmos tout entier. Les recherches effectuées à l’Institut Périmètre reposent sur l'idée que la science fondamentale fait progresser le savoir humain et catalyse l'innovation, et que la physique théorique d'aujourd'hui est la technologie de demain. Situé dans la région de Waterloo, cet établissement sans but lucratif met de l'avant un partenariat public-privé unique en son genre avec entre autres les gouvernements de l'Ontario et du Canada. Il facilite la recherche de pointe, forme la prochaine génération de pionniers de la science et communique le pouvoir de la physique grâce à des programmes primés d'éducation et de vulgarisation.

Pour de plus amples renseignements, veuillez vous adresser à :
Mike Brown
Gestionnaire, Communications et médias
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