De l’éclipse solaire à une carte de l’univers 11 milliards d’années en préparation, l’année a été riche en rebondissements dans le monde de la physique. Les chercheuses et chercheurs repoussent les limites de notre compréhension des théories bien établies, tout en dévoilant des images inédites de galaxies lointaines. Ils s’attaquent aussi à des défis scientifiques de taille — comme la manière de transporter de l’antimatière sans encombre. Voici 17 découvertes et nouvelles en physique qui ont fait les manchettes en 2024.
La grande éclipse solaire de 2024
Le 8 avril 2024, tous les regards se sont tournés vers le ciel à l’occasion d’une éclipse solaire totale rare et spectaculaire. Partout en Amérique du Nord et en Amérique centrale, on pouvait voir des groupes de personnes portant des lunettes d’éclipse réunies pour vivre ensemble ce phénomène céleste exceptionnel. Une éclipse partielle était visible à travers l’ensemble de ces régions, tandis que la trajectoire de totalité traversait certaines zones du Mexique, des États-Unis et du Canada.
Un informaticien de Toronto reçoit le prix Nobel de physique
Le scientifique canadien Geoffrey Hinton, souvent surnommé le « parrain de l’IA », a reçu le prix Nobel de physique, qu’il partage avec John Hopfield de l’Université Princeton. Tous deux sont des pionniers du domaine de l’apprentissage automatique et des réseaux de neurones. Le travail de Hinton a été récompensé pour ses découvertes et inventions fondamentales ayant permis le développement de l’apprentissage machine à l’aide de réseaux de neurones artificiels, soulignant les nombreuses applications novatrices des outils de la physique pour les technologies émergentes.
Les Nations Unies déclarent 2025 Année internationale des sciences et technologies quantiques
L’année 2025 sera officiellement l’Année internationale des sciences et technologies quantiques (IYQ). Cette initiative mondiale d’une durée d’un an « sera soulignée par des activités à tous les niveaux visant à sensibiliser le public à l’importance de la science quantique et de ses applications ». L’année 2025 a été choisie pour marquer les 100 ans depuis les débuts du développement de la mécanique quantique.
Une nouvelle direction pour Perimeter
L’Institut Périmètre de physique théorique a accueilli en 2024 une nouvelle directrice générale, Marcela Carena. Première femme à occuper ce poste, Carena a auparavant été titulaire d’une chaire de recherche émérite invitée – un poste autrefois occupé par Stephen Hawking – et préside le Comité consultatif scientifique de Perimeter depuis 2022. Elle prend les rênes à un moment charnière, alors que l’Institut s’apprête à célébrer son 25e anniversaire en 2025.
DESI a remonté le temps – 11 milliards d’années
Des scientifiques canadiens participant à l’expérience Dark Energy Spectroscopic Instrument (DESI) ont contribué à la première année d’analyse d’une fascinante nouvelle carte tridimensionnelle de l’Univers, révélant des détails inédits sur notre passé cosmologique. Cette collaboration a permis de produire la plus vaste carte 3D de l’Univers à ce jour, capable de remonter jusqu’à 11 milliards d’années dans le passé et d’aider les scientifiques à comprendre comment l’Univers s’est développé et transformé au fil du temps.
L’Event Horizon Telescope confirme la persistance de l’ombre d’un trou noir
Dans un article publié en 2024 dans la revue Astronomy & Astrophysics, la collaboration Event Horizon Telescope (EHT) a dévoilé de nouvelles images d’un trou noir supermassif situé au centre de la galaxie Messier 87. Les données recueillies lors d’observations en avril 2018 sont cohérentes avec les images de 2017, qui montraient un anneau lumineux circulaire, plus brillant dans sa portion sud. Le point de luminosité maximale de l’anneau a pivoté d’environ 30º par rapport aux images de 2017, ce qui cadre avec les modèles théoriques des chercheurs sur la variabilité causée par le matériau turbulent entourant les trous noirs. Une analyse plus poussée fournit aussi des renseignements précieux sur la géométrie du champ magnétique et la nature du plasma entourant le trou noir.
Le « désaccord de Hubble » est-il enfin résolu ?
La vitesse d’expansion de l’Univers est l’objet d’un débat animé chez les astronomes. Le « désaccord de Hubble » – ou Hubble Tension – suggère que notre modèle théorique du cosmos nécessiterait quelques ajustements, car le taux d’accélération de l’expansion semble avoir différé entre l’Univers primordial et l’Univers plus récent. En 2024, l’astronome Wendy Freedman, de l’Université de Chicago, a dirigé une équipe qui a mis au point de nouvelles méthodes pour mesurer le taux d’expansion à partir de données du télescope spatial James Webb. Ses résultats suggèrent que le désaccord entre les mesures concurrentes de la constante de Hubble pourrait désormais être résolu. Toutefois, le débat – parfois dramatiquement qualifié de « crise en cosmologie » – devrait se poursuivre à mesure que de nouvelles données seront collectées au cours des prochaines années.
De nouvelles images révèlent que la galaxie du Sombrero est moins en forme de chapeau qu’on ne le pensait
Coup de chapeau au télescope spatial James Webb de la NASA, qui a capté des images saisissantes de la galaxie du Sombrero, ainsi nommée parce que ses premières images rappelaient un large chapeau mexicain. Les nouvelles images à plus haute résolution – de la galaxie aussi connue sous le nom de Messier 104 – montrent pour la première fois son anneau externe. On y voit des amas complexes de poussière, pouvant indiquer la présence de jeunes régions de formation d’étoiles.
La Voie lactée et ses champs magnétiques
Un trou noir supermassif se trouve au cœur de notre galaxie, et en 2024, des chercheurs de Perimeter, en collaboration avec l’équipe de l’Event Horizon Telescope, ont contribué à capter des images inédites d’un niveau de détail jamais atteint. Les images de Sagittarius A* ont révélé l’anneau de plasma et les lignes de champ magnétique qui le structurent. Cela confirme la validité des meilleures théories actuelles sur la croissance et l’évolution des trous noirs supermassifs, offrant ainsi une base empirique à la science de l’évolution galactique et des environnements de gravité extrême.
La première horloge nucléaire
Quel compte à rebours serait complet sans parler de mesure du temps ? Des chercheurs au Colorado ont détecté un signal qu’ils attendaient depuis 50 ans : celui du noyau de thorium-229. Ce signal était la dernière pièce du casse-tête menant au développement de la toute première horloge nucléaire au monde, qui utiliserait les niveaux d’énergie nucléaire pour mesurer le temps avec une précision accrue.
La galaxie 9422 a été observée un milliard d’années après le big bang
Des chercheurs travaillant avec le télescope spatial James Webb de la NASA ont peut-être découvert un tout nouveau phénomène dans l’Univers primordial, qui pourrait aider à mieux comprendre les origines du cosmos. En septembre, ils ont annoncé l’observation d’une galaxie à la signature lumineuse étrange, qu’ils attribuent au fait que son gaz brille davantage que ses étoiles. Dans l’Univers local, les étoiles massives et chaudes typiques ont une température située entre 40 000 et 50 000 °C (70 000 à 90 000 °F). Observée environ un milliard d’années après le big bang, la galaxie 9422 pourrait représenter un chaînon manquant dans l’évolution galactique entre les premières étoiles de l’Univers et les galaxies bien établies que nous connaissons.
La mission Euclid de l’ESA dévoile de nouvelles vues de l’Univers
En mai, la mission spatiale Euclid de l’Agence spatiale européenne (ESA) a publié cinq nouvelles vues inédites de l’Univers. Ces images – et les données scientifiques associées – font partie des observations préliminaires de la mission Euclid. Cette première publication portait sur 17 objets astronomiques, allant de nuages de gaz et de poussière proches à des amas de galaxies lointains.
Hommage à Peter Higgs
En avril, le physicien Peter Higgs, lauréat du prix Nobel, est décédé à l’âge de 94 ans. Higgs est surtout connu pour avoir proposé l’existence du boson de Higgs, souvent appelé la « particule de Dieu ». Le boson de Higgs est la particule fondamentale associée au champ de Higgs, un champ qui confère une masse à d’autres particules fondamentales comme les électrons et les quarks. Le boson a été proposé en 1964 et découvert près de 50 ans plus tard.
Un nouvel ordinateur quantique surpasse la machine Sycamore de Google
Un nouvel ordinateur quantique, le H2-1, a exécuté un algorithme quantique simple appelé échantillonnage de circuits aléatoires (RCS), et a obtenu une amélioration 100 fois supérieure aux résultats atteints par la machine Sycamore de Google en 2019. Le H2-1 a été développé par l’entreprise de calcul quantique Quantinuum, en partenariat avec le géant des services financiers JPMorgan Chase. Il s’agit du premier ordinateur quantique de l’industrie doté de 56 qubits à ions piégés, et il fonctionnerait avec une consommation d’énergie environ 30 000 fois inférieure à celle des superordinateurs classiques.
Des mathématiciens réfutent Hawking sur les trous noirs extrêmes
En 1973, Stephen Hawking et ses collègues avaient soutenu qu’un type particulier de trou noir théorique appelé « extrême » ne pouvait pas exister dans l’Univers réel. Ces entités singulières n’ont aucune gravité de surface à leur horizon des événements, ce qui les rendait apparemment impossibles. Mais cette année, deux mathématiciens ont démontré qu’aucune loi physique connue n’empêche la formation de tels trous noirs. Toutefois, ce qui est mathématiquement possible n’est pas nécessairement réel, et la question de leur existence demeure ouverte.
L’expérience BASE pourrait ouvrir la voie à une antimatière transportable
L’antimatière est une ressource précieuse – et extrêmement délicate. Ses particules subatomiques sont si instables qu’elles s’annihilent au moindre contact avec la matière. En raison de cette fragilité, le CERN est actuellement le seul endroit au monde où des particules d’antimatière peuvent être piégées et étudiées. En novembre, des scientifiques de l’expérience BASE ont réussi à stocker puis transporter un nuage de protons à travers le site principal du CERN par camion. C’est une première étape vers la création éventuelle d’un service de livraison d’antiprotons vers d’autres laboratoires.
La physique quantique exclut les trous noirs faits de lumière
Les trous noirs se forment généralement par l’effondrement d’étoiles géantes. La théorie de la relativité d’Einstein prédisait aussi la possibilité de « kugelblitze » : des trous noirs entièrement constitués d’une concentration extrême de lumière. Mais des chercheurs de l’Université de Waterloo, dirigés par Álvaro Álvarez-Domínguez, ont démontré qu’il n’est pas possible de concentrer suffisamment de lumière pour former un trou noir. Leurs calculs font appel à l’effet Schwinger, un phénomène de physique quantique dans lequel un champ électrique intense crée de la matière. Selon eux, les particules et antiparticules seraient expulsées de la zone lumineuse et empêcheraient la formation du trou noir.
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À propos de l’IP
L'Institut Périmètre est le plus grand centre de recherche en physique théorique au monde. Fondé en 1999, cet institut indépendant vise à favoriser les percées dans la compréhension fondamentale de notre univers, des plus infimes particules au cosmos tout entier. Les recherches effectuées à l’Institut Périmètre reposent sur l'idée que la science fondamentale fait progresser le savoir humain et catalyse l'innovation, et que la physique théorique d'aujourd'hui est la technologie de demain. Situé dans la région de Waterloo, cet établissement sans but lucratif met de l'avant un partenariat public-privé unique en son genre avec entre autres les gouvernements de l'Ontario et du Canada. Il facilite la recherche de pointe, forme la prochaine génération de pionniers de la science et communique le pouvoir de la physique grâce à des programmes primés d'éducation et de vulgarisation.