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Very rubin observatory, Credit: Rubin Obs/NSF/AURA

Les mathématiques de la symétrie jettent un éclairage instructif sur la physique fondamentale

Une équipe de chercheurs de l’Institut Périmètre, de l’Université de Cambridge et de l’Université A&M du Texas vient de réaliser une première estimation, à partir d’arguments de symétrie mathématique, de l’ampleur d’un déséquilibre qui sévit dans le monde subatomique.

Une équipe de chercheurs de l’Institut Périmètre, de l’Université de Cambridge et de l’Université A&M du Texas vient de réaliser une première estimation, à partir d’arguments de symétrie mathématique, de l’ampleur d’un déséquilibre qui sévit dans le monde subatomique. Ce déséquilibre, appelé violation de la symétrie CP, ou violation CP, distingue la matière de l’antimatière et est essentiel pour comprendre pourquoi la matière domine l’antimatière dans la nature. Leur article intitulé Naturalness of CP Violation in the Standard Model (Caractère naturel de la violation de la symétrie CP dans le modèle standard) paraîtra dans l’édition du 27 mars 2009 de la revue Physical Review Letters.

En faisant appel à une nouvelle approche statistique, Gary Gibbons et Steffen Gielen, de l’Université de Cambridge, Chris Pope, de l’Université A&M du Texas, et Neil Turok, de l’Institut Périmètre, ont montré comment des matrices aléatoires peuvent servir à faire une estimation de l’ampleur de la violation de la symétrie CP à laquelle on devrait s’attendre dans la nature. À leur grande surprise, les résultats concordaient bien avec des données d’observation à propos des quarks. L’équipe a également montré comment cette approche pourrait permettre de juger si oui ou non il est probable qu’il y ait plus de trois familles de particules subatomiques dans la nature, et aussi de prévoir les propriétés des particules exotiques appelées neutrinos. Leurs travaux donnent en outre des indices sur le mécanisme physique à l’origine du déséquilibre entre matière et antimatière dans l’univers.

C’est là un nouveau chapitre d’une histoire qui dure depuis des décennies. Au début des années 1970, à l’époque où l’on croyait qu’il n’existait que deux familles de particules subatomiques, les Japonais Makato Kobayashi et Toshihide Maskawa ont utilisé des matrices pour prédire l’existence d’une troisième famille de particules. L’existence de cette troisième famille a permis de comprendre l’asymétrie de la nature qui conduit à la présence de plus de matière que d’antimatière, et donc à celle de tous les atomes qui constituent notre univers visible. Les particules dont ils avaient prédit l’existence théorique ont par la suite été effectivement observées dans des expériences : le quark c en 1974, le quark b en 1977 et le quark t en 1995. Kobayashi et Maskawa ont reçu le prix Nobel en 2008 pour cette idée fondamentale.

Selon Neil Turok : « Kobayashi et Maskawa ont expliqué pourquoi il était naturel de s’attendre à ce que les particules et les antiparticules soient légèrement différentes, mais ils n’ont pas expliqué quelle devait être l’ampleur de cette différence. Nous nous sommes donc demandé jusqu’à quel point, d’une manière générale, la matière et l’antimatière sont différentes. Ce que nos travaux expliquent, c’est que la valeur mesurée de la violation de la symétrie CP est une valeur typique. Nous avons également prédit les angles qui relient ou associent les différentes familles les unes aux autres, et là encore nous avons obtenu des valeurs approximativement correctes. En effet, nous nous sommes demandé s’il existe des phénomènes physiques plus complexes, que notre modèle actuel n’explique pas, ou s’il s’agit plutôt d’une physique typique. Évidemment, ce n’est pas la fin de l’histoire — il nous reste à trouver le mécanisme physique qui détermine l’ampleur réelle de la violation de la symétrie CP — mais cela nous donne une idée de la nature de ce mécanisme. » [traduction]

Les techniques mathématiques utilisées par les auteurs ont des répercussions en cosmologie et en théorie des cordes comme en physique des particules. Cela illustre l’interdisciplinarité qui rend la physique si passionnante de nos jours. Ces travaux font partie d’une collaboration croissante entre l’Institut Périmètre, l’Université de Cambridge et l’Institut George-P.-et-Cynthia-W.-Mitchell de physique fondamentale de l’Université A&M du Texas.

Pour ce qui est de l’avenir, cette nouvelle méthode mathématique donne un moyen d’évaluer, parmi les nombreuses modifications qui ont été proposées au modèle standard de la physique, lesquelles sont plus plausibles que d’autres. On peut l’utiliser, par exemple, pour tester un scénario postulant l’existence de quatre familles de particules subatomiques au lieu des trois familles actuellement acceptées. Autrement dit, à l’aide des seules mathématiques, on peut obtenir des réponses qu’aucun accélérateur de particules n’a encore pu fournir de manière expérimentale. Ces travaux peuvent donc guider la conception de futures expériences comme celles qui sont menées au grand collisionneur hadronique du CERN. Étant donné les coûts astronomiques de ce genre d’expériences à grande échelle, de telles indications peuvent s’avérer très utiles.

Voir l’article dans le numéro du 27 mars 2009 de la revue Physical Review Letters.

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