João Caetano et Jonathan Toledo lauréats du Prix Commémoratif John Brodie
Remis annuellement à un étudiant diplômé (ou, cette fois, à deux étudiants) travaillant sous la direction d’un chercheur de l’Institut Périmètre, ce prix a été créé à la mémoire de John Brodie, l’un des premiers postdoctorants de l’Institut. MM. Caetano et Toledo se sont mérité ce prix pour leur article intitulé χ Systems for Correlation Functions (Systèmes-χ pour des fonctions de corrélation).
Les lauréats font leur doctorat sous la direction du professeur Pedro Vieira. « Le prix Brodie vise à récompenser des esprits brillants, mais également indépendants, et ce travail est un parfait exemple combinant les deux qualités, affirme M. Vieira. L’article de MM. Caetano et Toledo constitue un résultat significatif dans ce domaine. Ce serait un article important pour un chercheur peu importe le stade de sa carrière, mais il est particulièrement impressionnant qu’il soit l’œuvre d’étudiants – leur premier article écrit sans supervision. » [traduction]
Les travaux qui ont valu ce prix à João Caetano et Jonathan Toledo ont commencé lorsque les deux doctorants ont participé à la conférence Integrability in Gauge and String Theory (Intégrabilité en théorie de jauge et théorie des cordes) tenue l’année dernière à l’Institut Périmètre. Ils ont assisté à un exposé sur les fonctions de corrélation pour trois opérateurs dans des théories quantiques des champs en régime de couplage fort, et ils ont décidé d’étendre ces résultats aux fonctions de corrélation pour quatre opérateurs.
Pour expliquer un peu le contexte, la théorie quantique des champs est un cadre servant à comprendre des particules physiques et leurs interactions en modélisant ces particules en fonction d’un champ sous-jacent – un peu comme si, pour comprendre le mouvement des nœuds d’un filet, on étudiait le filet dans son ensemble. La théorie quantique des champs constitue un système couronné de succès qui sous-tend la plus grande partie de la physique moderne.
João Caetano et Jonathan Toledo s’intéressent plus particulièrement à une théorie quantique des champs appelée théorie de Yang et Mills supersymétrique en dimension 4, intéressante pour les physiciens puisqu’on peut en principe la résoudre avec exactitude. Les fonctions de corrélation font partie des choses les plus intéressantes à étudier dans cette théorie, parce que si l’on peut résoudre toutes ces fonctions de corrélation, on peut en principe connaître toute l’information physique à propos de la théorie. En partant d’un système permettant de comprendre les corrélations entre trois opérateurs, MM. Caetano et Toledo voulaient obtenir un système permettant de comprendre les corrélations entre quatre opérateurs. Ils ont abouti à un système pouvant fonctionner avec un nombre quelconque d’opérateurs.
Au départ, les deux doctorants croyaient que leur projet serait facile – si facile que Jonathan Toledo pensait qu’il pouvait être résolu en une journée. « À première vue, dit M. Caetano, il n’y avait aucune raison pour laquelle les techniques fonctionnant pour trois points ne pourraient pas fonctionner pour quatre. » [traduction] Mais cela ne fonctionnait pas.
Leur directeur Pedro Vieira croyait aussi que ce pourrait être facile. « Lorsqu’ils ont commencé, je leur ai dit que ce problème pouvait se résoudre de manière triviale, à l’aide de techniques semblables à celles que nous utilisons souvent – je croyais que nous pouvions attaquer le problème avec des identités déterminantes jusqu’à ce qu’il soit résolu. J’avais tort.
« Il a fallu trouver des outils mathématiques plus puissants pour résoudre ce problème, poursuit M. Vieira. Les deux auteurs ont dû plonger dans certains articles très avancés, dont un de Davide Gaiotto (professeur à l’Institut Périmètre) sur les intersections de parois. Ils ont étudié ces travaux, et ils ont réussi à assimiler cette technologie, à l’examiner, à la simplifier, puis à l’appliquer avec le succès que l’on sait. » [traduction]
« Oui, finalement, il y avait une grande différence entre trois et quatre points, ajoute Jonathan Toledo. La bonne nouvelle, c’est que, après avoir franchi cette étape, cela devrait fonctionner pour un nombre quelconque de points. » [traduction]
« Ce résultat n’est qu’un début, affirme Pedro Vieira. Quand on le regarde, il est d’une grande beauté, et ses implications en physique ne demandent qu’à être interprétées, comprises et explorées plus à fond. Je crois que ce résultat est comme une île d’où ces étudiants pourront lancer d’autres explorations, et je suis certain qu’ils le feront avec beaucoup de succès. » [traduction]
LE PRIX COMMÉMORATIF JOHN-BRODIE
Ce prix honore la mémoire de John Brodie, l’un des premiers postdoctorants de l’Institut Périmètre. John Brodie s’est joint au jeune institut en 2001, après avoir obtenu son doctorat en physique théorique à l’Université de Princeton puis avoir fait un stage postdoctoral au Centre de l’accélérateur linéaire de Stanford. Au cours de sa brève carrière, il a publié quinze articles de recherche, dont plusieurs ont eu une grande influence. Ses recherches étaient remarquables par leur étendue, allant des effets non perturbateurs en théories de jauge supersymétriques à l’utilisation de théories des cordes pour décrire des liquides de Hall quantiques et la cosmologie de l’inflation cosmique. John Brodie a connu une mort tragique en 2006. Il n’avait que 36 ans.
À propos de l’IP
L'Institut Périmètre est le plus grand centre de recherche en physique théorique au monde. Fondé en 1999, cet institut indépendant vise à favoriser les percées dans la compréhension fondamentale de notre univers, des plus infimes particules au cosmos tout entier. Les recherches effectuées à l’Institut Périmètre reposent sur l'idée que la science fondamentale fait progresser le savoir humain et catalyse l'innovation, et que la physique théorique d'aujourd'hui est la technologie de demain. Situé dans la région de Waterloo, cet établissement sans but lucratif met de l'avant un partenariat public-privé unique en son genre avec entre autres les gouvernements de l'Ontario et du Canada. Il facilite la recherche de pointe, forme la prochaine génération de pionniers de la science et communique le pouvoir de la physique grâce à des programmes primés d'éducation et de vulgarisation.