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Des salons de quilles aux chambres à coucher, les objets phosphorescents attirent l’œil – et éveillent la curiosité. Mais si l’on y regarde de plus près, ils offrent aussi une leçon fondamentale de mécanique quantique.

J’ai grandi avec des étoiles phosphorescentes collées aux murs de ma chambre. J’en avais aussi mis sur les pales de mon ventilateur de plafond, pour faire tourner des « étoiles filantes » au-dessus de mon lit. Mais je ne me suis jamais demandé comment ça fonctionnait. Pas de piles, pas de chaleur. Juste une étrange lueur pâle.

Comme pour bien des choses dans la vie, quand on creuse un peu, on découvre que tout est quantique.

L’histoire de la phosphorescence – le mot savant pour dire « qui brille dans le noir » – commence à 147 millions de kilomètres d’ici, lorsqu’un photon s’échappe du Soleil. Huit minutes plus tard, il pénètre dans l’atmosphère terrestre. Quelques microsecondes après, il entre en collision avec quelque chose. Certains objets opaques – une dalle d’ardoise ou du béton, par exemple – absorbent l’énergie du photon, ce qui peut même les réchauffer (raison pour laquelle les tortues aiment se prélasser sur des rochers au soleil). Mais ce n’est pas cette histoire-là qu’on raconte ici.

Nous, ce qui nous intéresse, c’est ce qui se passe lorsque la lumière frappe une matière qui brille.

 

Ce qu’on vient de décrire, c’est la fluorescence – pas la phosphorescence. Dans la fluorescence, la lueur disparaît dès que la source lumineuse s’éteint. Le photon absorbé est réémis quelques nanosecondes plus tard – pratiquement instantanément à nos yeux.

Alors prenons un petit moment pour parler de mécanique quantique. Toute matière est composée de particules comme les électrons et les protons, liés entre eux dans les atomes. Ces particules peuvent gagner ou perdre de l’énergie – par exemple lorsqu’elles sont frappées par un photon entrant – mais cette énergie ne varie pas de façon continue. Ce n’est pas comme une rampe inclinée qu’on peut monter ou descendre en douceur. C’est plutôt comme une échelle. Une particule peut grimper d’un échelon complet, mais elle ne peut pas s’arrêter à mi-chemin. C’est tout ou rien.

Dans certains matériaux – comme les gilets de sécurité, les surligneurs, et ainsi de suite – un photon entrant sera absorbé par un électron, qui fera un bond vers un niveau d’énergie supérieur. Mais ça ne dure pas longtemps. Avec les chocs et les mouvements constants à l’échelle microscopique, cette énergie est rapidement perdue. Le photon est alors réémis à une longueur d’onde plus basse, tandis que l’électron excité retombe à un échelon inférieur.

Glow-in-the-dark mini golf uses phosphorescence to create vibrant, surreal landscapes—bringing quantum mechanics into playful focus. (3D Black Light - Mini Golf, photographed by Jure Ursic © Jure Ursic Photography)

La fluorescence reste un phénomène fascinant. Le photon entrant subit une transformation dans ce processus. Il perd un peu d’énergie, ce qui modifie sa longueur d’onde (et donc sa couleur). Les photons à haute énergie et à courte longueur d’onde – comme la lumière ultraviolette, bleue ou violette – ressortent avec des longueurs d’onde plus longues et une énergie plus faible, comme l’orange ou le rouge. Ainsi, un gilet de sécurité capte la lumière ultraviolette invisible et la réémet sous forme de lumière visible, ce qui le fait briller à nos yeux quand il est frappé par le Soleil.

Mais certains matériaux peuvent retenir le photon plus longtemps. Ils le gardent, même quand l’obscurité s’installe. C’est ce qu’on appelle la phosphorescence.

Il existe deux mécanismes principaux derrière la phosphorescence. Le premier, la « phosphorescence triplet », est un peu plus complexe – on y reviendra plus tard. Mais celle qui nous intéresse vraiment ici, c’est la « phosphorescence persistante ». Elle ne fonctionne que dans des matériaux composés de nombreux atomes organisés en réseau, comme dans un cristal. Un seul atome, ça ne suffit pas. Dans ces structures, il peut parfois y avoir des défauts : un atome manquant dans le réseau cristallin, une petite imperfection. Et c’est cette imperfection qui fait toute la magie – le photon entrant se fait piéger dans le réseau, comblant le vide, et faisant briller la matière.

Ça ne dure pas éternellement. À la longue, les vibrations finiront par libérer le photon, qui repartira avec une longueur d’onde plus basse – tout comme dans la fluorescence.

Glowworms in New Zealand’s Waitomo Caves use bioluminescence—a quantum process related to phosphorescence—to create stunning natural displays. (Waitomo Glowworm Caves, photographed by Marcel Strelow, Shutterstock)

Et voici le bout le plus cool (sans jeu de mots) : si vous refroidissez un matériau phosphorescent, vous pouvez faire durer la lueur plus longtemps, car cela réduit les vibrations qui pourraient libérer le photon.

Encore mieux – on peut transformer un matériau fluorescent en matériau phosphorescent simplement en le refroidissant, ce qui retarde les vibrations qui chasseraient le photon.

Et voilà. C’est ça, l’origine quantique des étoiles phosphorescentes sur les murs de ma chambre.

On s’arrête ici… à moins que vous n’ayez envie d’aller encore plus loin. Dans ce cas, voici :

Phosphorescence triplet

La phosphorescence triplet implique elle aussi la capture et l’émission d’un photon, mais le mécanisme qui retarde sa libération est différent.

Tout comme la règle des échelons d’échelle, une autre loi fondamentale de la mécanique quantique stipule que deux électrons ne peuvent pas occuper exactement le même état au même endroit et au même moment. C’est ce qu’on appelle le principe d’exclusion de Pauli. C’est d’ailleurs une des raisons pour lesquelles vous ne pouvez pas traverser un mur avec la main, comme un fantôme.

Concrètement, ce principe signifie qu’il ne peut y avoir que deux électrons par orbitale autour d’un atome – et ils doivent avoir des spins opposés.

Lorsqu’un photon entrant frappe un électron et le propulse vers une orbitale d’énergie supérieure, il arrive – rarement, mais il arrive – que le spin de l’électron change de direction, libéré de la contrainte d’être opposé à celui de son ancien partenaire. Cela dit, c’est bien plus courant que l’électron conserve son spin initial en sautant d’un niveau à l’autre. Et une fois excité, il est également rare que ce même électron inverse à nouveau son spin pour redescendre.

Et c’est justement là que réside la clé : comme le retour exige un changement de spin improbable, l’électron reste coincé plus longtemps dans cet état excité – uniquement à cause des lois de la probabilité. Et pendant ce temps-là… il phosphoresce!

Et les lucioles? Et la bioluminescence?

Certains phénomènes lumineux sont d’origine chimique. La bioluminescence chez les insectes, ou les « bâtons lumineux » qu’on active en les pliant – tout cela commence par une réaction chimique entre deux composés.

Bioluminescent plankton illuminating the shores of the Maldives, a vivid natural example of quantum processes in action. (Credit: nabyh/Shutterstock)

Les processus quantiques sont semblables, mais le déclencheur est différent. Et ils donnent lieu à certains des plus beaux spectacles lumineux de la nature.

Êtes-vous enseignant ou enseignante? Vous aimeriez avoir des plans de cours adaptés au programme pour expliquer les processus quantiques comme ceux abordés ici? Visitez notre page de ressources pour enseignants.

À propos de l’IP

L'Institut Périmètre est le plus grand centre de recherche en physique théorique au monde. Fondé en 1999, cet institut indépendant vise à favoriser les percées dans la compréhension fondamentale de notre univers, des plus infimes particules au cosmos tout entier. Les recherches effectuées à l’Institut Périmètre reposent sur l'idée que la science fondamentale fait progresser le savoir humain et catalyse l'innovation, et que la physique théorique d'aujourd'hui est la technologie de demain. Situé dans la région de Waterloo, cet établissement sans but lucratif met de l'avant un partenariat public-privé unique en son genre avec entre autres les gouvernements de l'Ontario et du Canada. Il facilite la recherche de pointe, forme la prochaine génération de pionniers de la science et communique le pouvoir de la physique grâce à des programmes primés d'éducation et de vulgarisation.

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